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Avec en France 70 000 cas et 9 000 décès par an, le cancer de la prostate est chez les hommes le plus fréquent et le plus mortel après celui du poumon. Les chances de guérison sont d’autant plus grandes qu’il est soigné précocement, ce qui impliquerait des premiers dépistages autour de 50 ans (près de 3% des hommes sont diagnostiqués entre 50 et 60 ans, près de 7% entre 60 et 70 et plus de 50% après 80).

Les dépistages entraînent cependant des risques de surdiagnostics, de surtraitements, avec leurs risques de séquelles notamment urinaires et sexuelles, ainsi que des surcoûts économiques et le bilan global reste un sujet important de débat.

 

Actuellement pas de dépistage de masse

Le dépistage de masse concerne toutes les personnes d’une tranche d’âge donnée ne présentant pas de risque particulier. En France, les dépistages de masse organisés en matière de cancer se limitent au cancer du sein, et au cancer colorectal.

En matière de prostate, un dépistage à large échelle pourrait être la seule mesure des taux de PSA  par simple prise de sang.

La Haute Autorité de Santé (HAS) et l’Association Française d’Urologie (AFU) rappellent que :

– Aucun programme de dépistage de masse n’est pour l’instant en vigueur en France, son bilan étant actuellement jugé négatif, sa faible efficacité attendue étant contrebalancée par les risques induits de surdiagnostics, de traitements liés à des faux diagnostics, de surtaitements et d’effets secondaires associés. En particulier, aucun programme de dépistage n’est envisagé chez les hommes de plus de 75 ans.

– Chaque décision de dépistage est actuellement individuelle ; chaque homme est donc pleinement informé des avantages comme des risques liés au dépistage précoce, tant par les médias et réseaux sociaux que par son médecin (comme le recommande également l’American Cancer Society).

 

Possibilités de dépistages pour des catégories de population

L’AFU recommande un dépistage pour certaines catégories de population :

– de 45 à 54 ans, annuel pour les hommes des groupes à risque (dont héréditaires, ethnographiques)

– de 55 à 69 ans, annuel pour les hommes dont le PSA est supérieur à 1 ng/ml et tous les 3 ans sinon

Elle entend ainsi ne pas négliger chez un public à risque un dépistage qui soit le plus économique et le moins invasif possible. Elle rappelle que depuis l’existence du dosage du PSA, la mortalité nationale du cancer de la prostate a baissé de 40%, à un rythme annuel de 3 %.

La HAS, quant à elle, ne recommande pas un tel dépistage du fait de son évaluation d’une trop faible corrélation des facteurs de risques avérés et des résultats des tests de PSA avec l’apparition de la maladie.

 

Les positions respectives de la HAS et de l’AFU résultent notamment des conclusions différentes de deux grandes études relatives à l’impact du dépistage du cancer de la prostate sur sa mortalité :

  1. Une étude américaine « PLCO », portant sur 75000 hommes de 55 à 74 ans avec un groupe soumis pendant 6 ans à un dépistage annuel et un groupe témoin, qui n’a pas mis en évidence de réelle différence de mortalité entre ces groupes.
  2. Une étude européenne « ERSPC », portant sur deux fois plus d’hommes de la même tranche d’âge avec un groupe soumis pendant 11 ans à un dépistage en moyenne tous les 4 ans et un groupe témoin, qui a, quant à elle, mis en évidence une réduction de 20% de la mortalité pour les hommes dépistés dans la tranche 55 – 69 ans.

 

Pour des campagnes d’information

L’AFU conclut dans un communiqué de presse de mars 2012 que:

«  Le dépistage par PSA diminue de façon importante la mortalité par cancer de la prostate. Les résultats de cette étude sont très favorables au dépistage, même si ils ne permettent pas de se prononcer en faveur du dépistage systématique ou de masse. Le dépistage par décision individuelle reste donc recommandé et, en pratique, utilisé par plus de deux hommes sur trois en France. … Il implique des larges campagnes d’information vers le grand public et les professionnels de santé portant sur ce cancer, ses risques d’évolution, son dépistage et sa prise en charge… incluant le guide d’information de la HAS, auquel a participé l’AFU, sur l’information à apporter aux hommes envisageant un dépistage individuel ».

 

Pour une réelle égalité en matière de prévention

Une large partie du public reste, quoi qu’il arrive, peu sensible à toutes les campagnes d’information, par manque d’accès à elles ou de culture. Dans ces conditions, l’absence de dépistage systématique devient un facteur d’inégalité devant l’accès aux progrès médicaux en matière de prévention.

Les cancers des patients les moins bien informés sont donc souvent détectés tard et / ou avec des métastases, alors qu’un dépistage aurait pu conduire à en éviter ou à en limiter la gravité. Les coûts élevés auxquels la société doit alors faire face, pourraient alors être supérieurs aux coûts d’une prévention de masse basée sur de simples prises de sang pour doser le PSA.

 

Dans ces conditions, il conviendrait d’orienter les efforts de recherche pour améliorer la spécificité, la sensibilité et la fiabilité des tests de dépistage afin de minimiser les risques de surtraitements et de surdiagnostics liés à des campagnes systématiques qui pourraient alors être envisagées.

 

Quelques éléments bibliographiques

Préconisations de la Haute Autorité à la Santé (HAS)

http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-06/depistage_du_cancer_de_la_prostate_-_analyse_des_nouvelles_donnees_rapport.pdf

http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2012-04/rapport_dorientation_-_cancer_de_la_prostate_2012-04-03_16-39-9_898.pdf

http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2013-06/ra2012_has.pdf

Préconisations de l’Association Française d’Urologie (AFU)

http://www.urofrance.org/fileadmin/medias/afu/communiques/2012-03-15_cancer-prostate.pdf

Avantages et inconvénients des dépistages de masse par dosage de PSA

https://assets.krebsliga.ch/downloads/factsheet_prostata_f_110607.pdf

http://www.cancer.ca/fr-ca/cancer-information/diagnosis-and-treatment/tests-and-procedures/prostate-specific-antigen-psa/

Avantages et inconvénients des dépistages individuels

http://www.ameli-sante.fr/cancer-de-la-prostate/depistage-du-cancer-de-la-prostate.html

http://www.esculape.com/uronephro/psa_performance_anaes.html

Dépistages de masse et individuels

http://www.academie-chirurgie.fr/ememoires/005_2012_11_1_052x055.pdf