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Le rétrécissement de l’urètre masculin est souvent méconnu ou diagnostiqué tardivement car les signes et symptômes qui en évoquent l’existence sont communs aux autres pathologies obstructives de l’appareil urinaire et les explorations d’imagerie les plus couramment utilisées n’explorent pas le canal de l’urètre correctement.

Or il est important de porter ce diagnostic précocement de façon à pouvoir traiter dans les meilleures conditions le rétrécissement de l’urètre et éviter ainsi qu’il n’endommage l’appareil urinaire.

NB : La terminologie relative à l’anatomie de l’urètre est définie dans l’article consacré à ce sujet .

 

Diagnostic positif

Le diagnostic repose surtout sur l’interrogatoire, la débitmétrie, l’endoscopie du canal urétral et certains examens d’imagerie spécifiques.

 

1.L’interrogatoire

Il est surtout basé sur le recueil par l’urologue des signes (objectifs) et des symptômes (subjectifs) dont se plaint le patient.

Parmi eux sont plus particulièrement évocateurs:

– les symptômes traduisant l’obstruction : affaiblissement du jet mictionnel représenté par la dysurie, troubles de la vidange vésicale

– des troubles mictionnels inflammatoires du bas appareil urinaire comme l’augmentation du nombre des mictions (pollakiurie) et le caractère impérieux du besoin d’uriner ;

– des abcès au niveau des bourses ou du périnée ou des écoulements urétraux

– une éjaculation sans pression ou baveuse.

Il est important de rechercher chez ce patient des antécédents qui pourraient favoriser la survenue d’un rétrécissement de l’urètre comme un traumatisme avec fracture du bassin ou une chute à califourchon, ou surtout des interventions chirurgicales endoscopiques ayant porté sur le bas appareil urinaire ou la notion de manœuvres rétrogrades sur l’urètre (sondage vésical parfois traumatique).

Tous ces signes et symptômes sont décrits plus en détail dans un article spécifique.

 

2.L’examen clinique

Il comprend systématiquement :

  • l’examen de l’abdomen et des fosses lombaires : la présence d’une vessie en rétention après la miction peut être évoquée par la palpation d’un globe vésical ou la percussion d’une matité sus pubienne. Elle est confirmée par une échoscopie ou un bladder scan.
  • L’examen des organes génitaux externes et notamment du méat urétral. La palpation du bulbe urétral au niveau du périnée peut rarement montrer une induration en relation avec des phénomènes infectieux.
  • Un toucher rectal qui palpe la prostate
  • Il est intéressant de voir uriner le patient pour apprécier les caractères de sa miction et l’aspect des urines (claires ou troubles, filamenteuses, sanglantes…). L’analyse de la miction est au mieux réalisée par la débitmétrie qui apporte des données quantitatives et comparatives d’un examen à l’autre.

3.Les examens biologiques

Ils apportent peu au diagnostic de la sténose de l’urètre. Il sera nécessaire de rechercher une infection des urines par la réalisation d’un examen cytobactériologiques des urines (ECBU) et d’évaluer la fonction rénale par l’étude de la clairance de la créatinine par la formule du MDRD.

 

4.La débitmètrie et l’endoscopie

La débimétrie permet d’évaluer les caractéristiques de la miction. C’est un examen très simple, pratiqué au cabinet de l’urologue ou du radiologue, non invasif. On demande au patient de venir la vessie pleine et d’uriner dans le débitmètre.  On obtient une courbe dont l’allure peut renseigner sur l’absence (courbe en cloche) ou au contraire  l’existence d’une dysurie (courbe aplatie)  et on recueille les données chiffrées caractérisant la miction, surtout le volume uriné, le débit maximum de la miction et le débit moyen exprimés en millilitres par seconde, ainsi que la durée de la miction.

Le débit maximum traduisant la dysurie est inférieur à 10 ml/seconde.

La débimétrie n’est interprétable que si l’examen a porté sur une miction d’au moins 150 ml.

Cet examen très simple peut être répété au cours des différentes consultations et permettre des comparaisons utiles pour apprécier l’évolution de l’état du patient.

 

débimétrie

 

L’endoscopie du canal urétral (urétroscopie) réalisée à l’aide d’un endoscope souple et fin (fibroscope urinaire) inséré dans l’urètre par le méat et sous anesthésie locale permet un diagnostic immédiat quand la progression de l’appareil vers la vessie est rendue impossible par la présence du rétrécissement qu’il ne peut franchir. La fibroscopie de l’urètre ne renseigne toutefois que sur l’extrémité distale de la sténose et sur son caractère serré ou non. Elle ne permet pas de connaître la longueur de ce rétrécissement, ni l’état de l’urètre et de la vessie en amont du rétrécissement et ces données sont importantes pour poser les indications du traitement.

 

5.Des examens d’imagerie

Il s’agit d’opacifier le canal de l’urètre et cela peut être réalisé dans le sens du flux mictionnel (explorations antégrades) ou dans le sens contraire de ce flux (explorations rétrogrades).

L’opacification antégrade est obtenue lorsque la vessie du patient est pleine de produit de contraste, en lui demandant d’uriner en position debout et en prenant des clichés radiologiques de sa miction de ¾ de façon à bien dérouler le canal de l’urètre.

On obtient ainsi des renseignements sur :

  • L’état de la vessie : forme, capacité, irrégularité de ses parois, présence de diverticules, recherche de lésions associées (calculs, tumeur), qualité de la vidange vésicale par l’ultime cliché post-mictionnel ;
  • L’ouverture du col de la vessie;
  • Le canal de l’urètre proprement dit avec les caractéristiques du rétrécissement et notamment son siège, à l’endroit où existe une disparité de calibre du canal, et son retentissement en fonction de l’importance de la dilatation de la portion d’urètre située au dessus de la sténose ;

Un cliché en miction contrariée, obtenu au cours de la miction en pinçant le gland pour obturer le canal de l’urètre à sa partie la plus distale, précise la longueur de la sténose, son aspect et si elle est peu ou très serrée.

Imagerie cliché en miction contrariée

 

L’opacification rétrograde de l’urètre est obtenue en injectant le produit de contraste par le méat de l’urètre.

Imagerie opacification rétrograde de l’urèthre

Les examens d’imagerie qui permettent d’étudier l’urètre sont :

  • L’urographie intra-veineuse (UIV) : c’est un examen qui était autrefois très utilisé en urologie et qui n’a aujourd’hui que de rares indications. L’opacification de la voie excrétrice urinaire est obtenue en injectant par voie intra-veineuse un produit de contraste iodé (chez un patient ne présentant pas d’allergie à l’iode) . Il permet l’étude du haut appareil urinaire, et celle du bas appareil urinaire, notamment au cours de l’étude mictionnelle qui comprend la prise de clichés pré-mictionnels à vessie pleine, d’un ou plusieurs clichés per- mictionnels pris au cours de la miction du patient après lui avoir demandé d’uriner, et d’un cliché post mictionnel pour apprécier l’importance du résidu vésical.
  • La cystographie sus pubienne avec uréthrographie descendante : elle réalise la même étude du bas appareil urinaire que celle obtenue par le temps mictionnel de l’urographie intraveineuse. L’opacification de la vessie est obtenue en demandant au patient de venir à l’examen avec la vessie très pleine d’urine, ce qui permet de la ponctionner au dessus du pubis avec une aiguille fine à travers laquelle le produit de contraste est injecté directement dans la vessie.
  • L’uréthro-cystograpie rétrograde et mictionnelles (UCRM) où le remplissage de la vessie est obtenu en injectant le produit de contraste au niveau du méat de l’urètre, à contre courant. Il comporte deux phases, permettant ainsi une étude optimale de l’urètre : l’urétrographie rétrograde, suivie de l’urétro-cystographie descendante qui correspond à la même étude mictionnelle que celle réalisée au cours de l’urographie intra veineuse. Il est important avant la réalisation de cet examen de s’assurer que les urines sont bien stériles en pratiquant un ECBU.
Volumineux hématome des bourses

Volumineux hématome des bourses après rupture traumatique de l’urèthre bulbaire consécutive à une chute à califourchon

L’échographie et les examens d’imagerie en coupe (scanner et IRM) sont de peu d’utilité dans le bilan des rétrécissements de l’urètre. Ces deux derniers examens et notamment l’IRM sont utiles surtout en cas de sténoses post-traumatiques pour évaluer les lésions de l’urètre membraneux et de la jonction bulbo membraneuse.

 

Cet examen  permet également d’analyser les lésions spongieuses péri-urétrales, souvent causes de récidives.

 

 

Diagnostic différentiel

L’urologue doit affirmer le diagnostic de la sténose de l’urètre et éliminer les autres causes de dysurie et d’obstruction du bas appareil urinaire masculin et notamment :

une hypertrophie bénigne de la prostate ;

un cancer de la prostate ;

une prostatite chronique ;

une maladie ou sclérose du col vésical ;

une vessie neurologique.

 

Quelques éléments bibliographiques

En français

http://www.dematice.org/ressources/DCEM2/urologie/D2_uro_008/co/document.pdf

http://www.medecine-cours.com/2013/03/retrecissement-de-luretere-diagnostic.html

http://urofrance.org/science-et-recherche/base-bibliographique/article/html/lurologie-par-ses-images-partie-i-chapitres-ii-iii-et-iv-traumatismes-vesicaux-de-lurethre.html

http://urofrance.org/nc/lurologie-grandpublic/fiches-patient/resultats-de-la-recherche/html/ureteroscopie.html

En anglais

http://www.urethralcenter.it/English_version/pagine/diagnosi.html

http://www.mayoclinic.org/diseases-conditions/urethral-stricture/care-at-mayo-clinic/tests-diagnosis/con-20037057

http://www.ejradiology.com/article/S0720-048X(09)00368-4/abstract

http://nyulangone.org/conditions/urethral-stricture/diagnosis

http://www.urethralsurgery.com/urethral_stricture.asp

http://www.uroinfo.ca/brochures_kidney_fr/renalColic_fr.html