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Une étude publiée à l’été 2020 par les scientifiques américains du Memorial Sloan Kettering Cancer Center (MSK) rapporte une découverte particulièrement intéressante. Ils auraient identifié des cellules résistantes aux thérapeutiques du cancer de la prostate en périphérie de la tumeur. Cette trouvaille permet de comprendre la résistance aux thérapies de ce type de cancers prostatiques et pourra, dans un futur proche, permettre d’adapter les plans de traitements des patients.

 

Le microenvironnement de la tumeur

Le cancer ne survient pas spontanément dans le corps humain. Il prend naissance dans le microenvironnement de la tumeur. Concrètement, il se propage dans l’organisme grâce aux alentours de la masse tumorale( tissus, vaisseaux sanguins, cellules immunitaires, autres composants sains).

Des études s’orientent donc vers l’analyse de ce microenvironnement tumoral pour espérer élaborer de nouvelles prises en charge thérapeutiques et limiter la résistance aux traitements. Jusqu’ici, les recherches et essais réalisés sur le cancer de prostate se sont plutôt concentrés sur les modifications moléculaires intervenant à l’intérieur des cellules de la tumeur. Mais les chercheurs n’avaient pas totalement envisagé la possibilité d’une influence du microenvironnement de celle-ci dans la résistance aux traitements.

Dans ce contexte, les médecins et chercheurs du MSK ont révélé l’existence d’une protéine au sein du microenvironnement de certaines tumeurs prostatiques, capables de résister à l’hormonothérapie. Elle serait responsable de la mauvaise réponse thérapeutique de certains types de cancers de prostate à certains médicaments. Cette découverte est primordiale pour comprendre le processus de résistance thérapeutique et permet maintenant d’orienter les recherches pour réussir à bloquer l’action de cette protéine.

 

Cancer de prostate résistant à l’hormonothérapie

Tumeurs de la prostate - les cancers agressifs de haut gradeLe plan de traitement proposé aux patients atteints de cancer de la prostate est décidé lors d’une RCP en fonction de plusieurs caractéristiques de la maladie. Il peut s’appuyer sur le stade, le grade, la taille de la tumeur, la propagation de la maladie, les risques de récidive, etc. Dans les cancers les moins avancés, le traitement de référence repose souvent sur la chirurgie et la radiothérapie prostatique. En revanche, chez les hommes atteints d’une forme localement avancée de cancer de prostate, le traitement consiste à réaliser soit une chirurgie de prostate, soit une radiothérapie. Ce traitement est souvent complété par une hormonothérapie dite “de privation androgénique”. Ces médicaments bloquent les hormones masculines, dont la testostérone. Or, les tumeurs de la prostate ont besoin de ces hormones pour vivre, s’agrandir et se propager.

Malheureusement, il arrive souvent que la tumeur ne réponde pas longtemps au traitement par hormonothérapie, et qu’elle réussisse à contourner le blocage androgénique pour continuer son expansion.

 

Un nouvel objectif : bloquer la résistance aux traitements

Des tentatives ont été réalisées par le MSK au cours de ces dernières années pour tenter de restaurer la sensibilité au blocage hormonal grâce à d’autres traitements. Malgré ces efforts, les scientifiques ont constaté que cette solution n’était que temporaire et que bon nombre de ces tumeurs finissaient par reprendre leur croissance.

La priorité a donc été de trouver d’autres méthodes pour empêcher la progression de la maladie (comme c’était le cas dans 60 % des tumeurs, avec cette option). Le microenvironnement de la tumeur a été analysé dans d’autres cancers. Il fallait donc appliquer ces méthodes au cancer de la prostate.

C’est avec cet objectif que les chercheurs ont commencé leurs travaux : étudier le rôle du microenvironnement tumoral dans le cancer prostatique. L’étude à notamment portée sur les tumeurs localement avancées traitées par hormonothérapie.

C’est dans ce contexte que la découverte de la protéine baptisée NRG1 a été faite, sur des modèles de souris et des cultures de cellules du cancer prostatique de patients. La NRG1 se trouve dans les cellules stromales situées dans le microenvironnement qui entoure la tumeur de prostate. Cette protéine en activerait une autre, nommée HER3. C’est ce processus qui permettrait de stimuler la croissance tumorale en contournant le blocage androgénique induit sur les cellules cancéreuses.

 

Vers l’élaboration de nouvelles thérapeutiques ?

La protéine HER2, apparentée à HER3, est bien connue des services d’oncologies puisqu’elle a une influence sur le choix de traitements (des cancers du sein, notamment). Cependant, les traitements existants qui permettent de bloquer ces protéines n’ont jusqu’ici pas été d’une grande efficacité chez les patients atteints d’un cancer prostatique.

Grâce à ces résultats prometteurs, les auteurs de l’étude sont confiants quant aux possibilités thérapeutiques futures. Ils parlent notamment de la possibilité de développer un traitement à base d’anticorps. Ceux-ci seraient capables de bloquer l’action de ces protéines par une approche différente de celles déjà tentées ces dernières années avec les résultats que l’on connaît. Par ailleurs, ils rappellent que de tels anticorps sont déjà existants pour d’autres pathologies. Ils parlent aussi d’un anticorps expérimental spécifique, étudié en laboratoire, qui aurait validé cette approche novatrice.

Cette nouvelle approche innovante apportera, sans aucun doute, des avantages dans la prise en charge des cancers prostatiques localement avancés.

 

Bibliographie

A New Approach in Prostate Cancer: Targeting the Cells Surrounding the Tumor – https://www.mskcc.org/news/new-approach-prostate-cancer-targeting-cells-surrounding-tumor