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La chimiothérapie conventionnelle est très peu efficace dans le cancer du rein.

La radiothérapie est contre-indiquée car ce cancer n’est pas radio-sensible et de toutes façon les rapports très étroits du rein et de l’intestin ne permettent pas d’irradier à dose importante du fait des risques de nécrose intestinale.

L’utilisation de nouveaux agents d’anti-angiogenèse en association éventuelle avec une immunothérapie par Interleukine et Interféron est un progrès majeur pour ces patients porteurs de cancers évolués et disséminés.

Mais ces traitements sont d’autant plus efficaces qu’ils s’adressent à un volume de cancer moins important et il faut donc habituellement pratiquer en premier lieu une chirurgie de réduction tumorale.

Une opération chirurgicale est-elle encore possible chez les patients atteints d’un cancer du rein évolué ?

Oui et c’est habituellement le premier temps du traitement.

La chirurgie permet de réduire le volume tumoral dans ces formes graves de cancer du rein, et d’accroître ainsi l’efficacité des traitements d’immunothérapie et d’anti-angiogenèse qui ont permis de récents et remarquables progrès en termes de rémissions de la maladie.

Cette opération est une néphrectomie élargie avec surrénalectomie, emportant le rein cancéreux, la surrénale et la graisse de la loge rénale, ainsi que les aires satellites de drainage du système lymphatique par la réalisation d’un curage ganglionnaire. Celui-ci peut être d’ailleurs particulièrement périlleux et difficile en cas de ganglions massivement envahis adhérents à la veine cave inférieure.

Cette chirurgie peut être élargie selon les besoins à l’ablation d’organes de voisinage envahis par la tumeur (rate, colon, diaphragme etc…). La résection d’un bourgeon tumoral veineux est d’autant plus difficile que le bourgeon remonte plus haut dans la veine cave inférieure et qu’il adhère aux parois de ce vaisseau.

       Légendes de l'imagerie par résonance magnétique d'un thrombus cave volumineux

C’est l’une des caractéristiques de l’extension des cancers du rein que cette propagation préférentielle de la tumeur vers le système veineux et les ganglions lymphatiques.

Les risques et les difficultés sont maximales en cas de bourgeon cancéreux remontant dans les cavités cardiaques, avec réalisation d’une chirurgie à deux équipes (urologique et vasculaire cardiaque) et circulation extra-corporelle lors du temps d’ouverture de l’oreillette droite.

Une opération chirurgicale peut-elle guérir les patients ?

Dans beaucoup de cas de cancers du rein, le pronostic apparaît favorable parce que le cancer est limité au rein d’après les données du bilan d’extension, sans aucun aspect d’envahissement tumoral en dehors de la loge rénale : ni au ganglions, ni aux organes de voisinage, ni aux organes à distance par le biais des métastases.

C’est l’indication idéale à la réalisation rapide d’un traitement chirurgical qui assure seul (puisque chimiothérapie et radiothérapie sont inefficaces et l’immunothérapie ainsi que les agents d’antiangiogenèse réservés aux formes évoluées) la guérison des patients dans la majorité des cas :

  • le taux de rémission complète à 5 ans est de 90 à 95% pour les tumeurs opérées de moins de 4 cm. de diamètre ;
  • il reste de 80 à 85% pour les tumeurs plus volumineuses mais qui restent confinées à la loge rénale.

Que sont la radiofréquence ou la cryothérapie ?

Les traitements par voie per-cutanée des cancers localisés du rein, sous guidage ultrasonographique, scanographique ou par résonance magnétique, détruisent la tumeur par la chaleur (radiofréquences) ou par le froid (cryothérapie).

Ils sont en cours d’évaluation dans le cadre de protocoles et réservés actuellement aux seuls sujets pour lesquels on ne peut pas envisager sans prendre des risques déraisonnables une chirurgie en raison de leur âge ou des pathologies qu’ils présentent notamment dans la sphère cardio-circulatoire ou respiratoire.

Le cancer est ici détruit « in situ » et non retiré, ce qui ne permet pas d’avoir la confirmation anatomo-pathologique du diagnostic et d’apprécier les données histo-pronostiques qui en découlent.

Quelle est l’étendue de l’exérèse chirurgicale classique ?

Le traitement chirurgical des tumeurs de plus de 4 centimètres de diamètre est la réalisation d’une néphro-surrénalectomie élargie retirant la totalité du rein et de la surrénale ainsi que toute l’atmosphère cellulo-ganglionnaire et la graisse de la loge rénale qui est ainsi évidée en fin d’intervention, laissant apparaître dénudé le gros vaisseau adjacent, veine cave inférieure pour le cancer du rein droit et aorte abdominale pour le cancer du rein gauche.

La surrénale peut dans des cas particuliers être conservée, en particulier pour certains cancers du pôle inférieur du rein.

Cette exérèse complète par néphrectomie élargie est également nécessaire dans certains cas de tumeurs de moins de 4 centimètres de diamètre notamment en raison de la localisation de la tumeur, médio-rénale, développée dans le hile du rein à proximité de l’artère et de la veine rénale ou de leurs branches de division.

La fiche d’information de l’Association Française d’Urologie (AFU): néphrectomie élargie, détaille les avantages, risques et complications possibles, même exceptionnels de cette intervention.

Et conserver une partie du rein ? Oui.

Dans un certain nombre de cas, une chirurgie moins étendue que la néphrectomie totale élargie, ne retirant que la portion du rein atteinte par le cancer pour conserver la majeure partie de l’organe paraît réalisable : c’est la néphrectomie partielle
La tranche de section chirurgicale au niveau du rein doit passer suffisamment à distance de la tumeur pour conserver une marge de sécurité. A ce prix, le taux de récidive du cancer après chirurgie conservatrice du rein n’est pas supérieur à celui après ablation complète de l’organe.

L’avantage de cette néphrectomie partielle est de préserver dans la mesure du possible le capital néphronique du patient (nephron-sparring surgery chez les anglo-saxons) et par là même sa fonction rénale.

Il s’agit idéalement de cancers de mois de 4 centimètres de diamètre situés à un pôle du rein.
Mais des exérèses partielles sont également envisageables au cas par cas lorsque la localisation du cancer apparaît moins favorable, et les indications de cette chirurgie partielle seront poussées à l’extrême en cas de développement d’un cancer sur un rein unique fonctionnel, ou en cas de cancer du rein bilatéral.

Cependant il faut bien avoir à l’esprit que cette exérèse rénale partielle est techniquement plus difficile que l’exérèse complète, qu’elle est aussi plus périlleuse, notamment si on considère le risque de complications hémorragiques au cours ou au décours de l’intervention, et qu’elle expose le patient à un risque accru de complications post-opératoires, notamment fistules urinaires.

L’opéré est averti avant la réalisation de cette néphrectomie partielle de la possibilité que le chirurgien doive réaliser au cours de l’intervention une exérèse complète de nécessité (néphrectomie totale) pour laquelle il doit donner son consentement.
Cela se voit dans les cas où le chirurgien est confronté au cours de l’intervention à des difficultés inattendues, résultant notamment d’un saignement important et non maîtrisable sans cette mesure.

La fiche d’information de l’Association Française d’Urologie (AFU) : néphrectomie partielle, détaille les avantages, risques et complications possibles, même exceptionnels de cette intervention.

Quels types de cicatrices laisse la chirurgie classique ?

Cette chirurgie d’exérèse rénale, partielle, ou élargie et plus ou moins étendue en fonction de l’extension de la tumeur, est réalisée classiquement par voie ouverte, sanglante.

Le type d’incision réalisée dépend des caractéristiques de la tumeur, du type d’intervention à réaliser et des habitudes du chirurgien.

Il s’agit habituellement d’une grande incision abdominale antérieure.
Elle peut être verticale du sternum au pubis (incision xypho-pubienne) éventuellement agrandie par une sternotomie au thorax si l’abord du cœur est nécessaire en cas de bourgeon veineux étendu.
Elle est plus souvent légèrement oblique par rapport à l’horizontale, suivant le rebord inférieur des côtes (incision sous-costale limitée au côté du rein cancéreux ou débordant de l’autre côté jusqu’à l’incision bi-sous-costale).

Il peut également s’agir d’une incision latérale comportant la résection plus ou moins étendue d’une des dernières côtes : incision de lombotomie, ou lombo-abdominale ou au maximum thoraco-phréno-laparotomie, permettant également l’abord d’un bourgeon veineux remontant haut dans la veine cave inférieure.

Dans tous les cas, le choix de l’incision doit permettre l’abord premier des vaisseaux rénaux et en particulier la ligature première ou le clampage premier de l’artère rénale avant la mobilisation et l’exérèse rénale.

Il s’agit donc toujours d’une chirurgie lourde, voire majeure.
Les incisions sont importantes comportant leurs risques propres de complications et de séquelles, notamment éventrations invalidantes et de traitement difficile notamment pour les éventrations de la fosse lombaire.

La chirurgie par cœlioscopie a t’elle une place ?

La chirurgie par cœlioscopie prend actuellement une place de plus en plus importante dans l’arsenal thérapeutique chirurgical du cancer du rein.

Elle s’adresse aux tumeurs localisées, dont le diamètre n’excède pas 7 centimètres.
Pour les tumeurs plus volumineuses, la cœlioscopie est dangereuse car l’abord des gros vaisseaux devient très difficile, et n’a plus d’intérêt car l’incision qu’il faut réaliser en fin d’intervention pour extraire le rein cancéreux est trop importante et rejoint la taille de l’incision nécessaire pour la réalisation de la chirurgie classique.

Cependant les conditions de révélations actuelles de la maladie, le plus souvent fortuites à l’occasion d’un examen d’imagerie demandé pour un autre motif, font que le diagnostic est le plus souvent porté à ce stade relativement précoce où le cancer apparaît curable par la chirurgie.

Le type d’intervention réalisée est le même que par la voie ouverte classique.

La néphrectomie élargie, avec ou sans surrénalectomie, est l’intervention de référence.

Pour les tumeurs d’un volume inférieur à 4 centimètres de diamètre, la néphrectomie partielle est également envisageable entre des mains entraînées car il s’agit d’une chirurgie techniquement délicate.

Cette chirurgie rénale par cœlioscopie nécessite pour l’introduction de la caméra et des instruments nécessaires à sa réalisation 5 incisions de 5 à 10 millimètres chacune.

En fin d’intervention, la pièce opératoire est extraite dans un sac afin qu’il n’y ait pas de contact entre le cancer et la paroi de l’opéré. On évite ainsi les risques de dissémination pariétale de la tumeur. L’une des incisions de trocart est agrandie sur quelques centimètres pour permettre cette extraction.
Outre une réduction importante de la rançon cicatricielle et une limitation des risques ultérieurs d’éventration, la cœlioscopie permet d’éviter le recours à l’incision latérale lombaire avec résection costale, assez délabrante.

Par ailleurs le confort des suites post-opératoires est celui bien connu des interventions par cœlioscopie avec notamment une réduction importante de la douleur post-opératoire, une reprise plus précoce du transit intestinal et en définitive une convalescence plus courte et une reprise plus rapide des activités habituelles et professionnelles.

Préalablement à la réalisation de cette chirurgie rénale par cœlioscopie , le patient doit être prévenu de la nécessité possible d’une conversion en chirurgie classique ouverte en fonction des difficultés rencontrées par le chirurgien, surtout du fait du risque hémorragiques, et il doit donner son consentement pour cette éventualité.

Si une néphrectomie partielle par cœlioscopie est envisagée, le patient doit en outre être prévenu, de la même façon qu’indiqué préalablement pour la néphrectomie partielle classique par voie ouverte, de la possibilité pour le chirurgien d’avoir à réaliser une néphrectomie totale de nécessité en fonction des constatations ou des incidents per-opératoires.

ARTICLES:

    • ACTUALITÉS DANS LE CANCER DU REIN MÉTASTATIQUE
      B. ESCUDIER (Institut Gustave Roussy, Villejuif, France.)
      FLAMMARION MÉDECINE-SCIENCES — ACTUALITÉS NÉPHROLOGIQUES 2003 – pp. 267-283
    • A Randomized Trial of Bevacizumab, an Anti–Vascular Endothelial Growth Factor Antibody, for Metastatic Renal Cancer
      James C. Yang, M.D., Leah Haworth, B.S.N., Richard M. Sherry, M.D., Patrick Hwu, M.D., Douglas J. Schwartzentruber, M.D., Suzanne L. Topalian, M.D., Seth M. Steinberg, Ph.D., Helen X. Chen, M.D., and Steven A. Rosenberg, M.D., Ph.D.
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      JEAN-JACQUES PATARD, OLEG SHVARTS, JOHN S. LAM, ALLAN J. PANTUCK, HYUNG L. KIM, VINCENZO FICARRA, LUCA CINDOLO, KEN-RYU HAN, ALEXANDRE DE LA TAILLE, JACQUES TOSTAIN, WALTER ARTIBANI, CLAUDE C. ABBOU, BERNARD LOBEL, DOMINIQUE K. CHOPIN, ROBERT A. FIGLIN, PETER F.A. MULDERS, ARIE S. BELLDEGRUN
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    • Partial Nephrectomy for Small Renal Masses: An Emerging Quality of Care Concern?
      David C. Miller, John M. Hollingsworth, Khaled S. Hafez, Stephanie Daignault, Brent K. Hollenbeck
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    • Laparoscopic partial nephrectomy for cancer: techniques and outcomes
      Mauricio Rubinstein; Jose R. Colombo Jr; Antonio Finelli; Inderbir S. Gill
      Int. braz j urol. vol.31 no.2 Rio de Janeiro Mar./Apr. 2005

 

LIVRES:

Kidney Cancer
Eric M. Wallen, MD, Geoffrey F. Joyce, PhD, Matthew Wise, MPH
Urologic Diseases in America, chapter 10, pp. 337-376

in: Litwin MS, Saigal CS, editors. Urologic Diseases in America. US Department of Health and Human Services, Public Health Service, National Institutes of Health, National Institute of Diabetes and Digestive and Kidney Diseases. Washington, DC: US Government Printing Office, 2007