Seule la réalisation de biopsies de la prostate permet d’affirmer le diagnostic d’un cancer de la prostate et d’envisager les modalités de son traitement. Cependant, puisqu’il s’agit d’une exploration invasive, des éléments cliniques et para-cliniques permettent de sélectionner les hommes auxquels l’urologue propose la réalisation de biopsies de la prostate.
Les éléments permettant de suspecter un cancer de la prostate
Ils sont au nombre de trois :
– clinique : le toucher rectal. Sa pratique doit être systématique et il fait partie intégrante de tout examen uro-génital. Les anomalies de la prostate au toucher rectal – nodule dur classiquement pierreux, asymétrie des lobe prostatiques, perception d’une zone plus ferme ou indurée par rapport au reste de la glande – sont très spécifiques du cancer de la prostate. Elles justifient à elle seules de réaliser des biopsies de la prostate, quel que soit le taux de PSA. Cependant le toucher rectal est un examen peu sensible pour le diagnostic du cancer de la prostate car il est habituellement normal dans les cancers à un stade précoce qui sont les cancers curables.
– biologique : le dosage du PSA. Cette glyco-protéine sécrétée par les cellules prostatiques, est très spécifique, comme son nom l’indique, du tissu prostatique mais pas du cancer de la prostate. C’est pourquoi ce marqueur peut présenter, en cas de cancer, des taux supérieurs à la normale. Un taux inférieur à la norme (4 ng/ml. pour la plupart des kits de dosage) n’élimine toutefois pas les risques de cancer et, par ailleurs, il existe des faux positifs (souvent près de 70%) pouvant conduire à d’inutiles traitements. Il convient donc de compléter cette analyse.
C’est la raison pour laquelle plusieurs notions ont été dérivées du dosage du PSA : PSA corrélé à l’âge, densité et vélocité du PSA, rapport du PSA libre au PSA total et plus récemment pro-PSA et calcul de l’index phi.
Ces renseignements, déduits de l’étude du PSA ne doivent cependant jamais prendre l’ascendant sur le bon sens et l’indication des biopsies est portée par le médecin sur la constatation d’un faisceau d’arguments tirés de la confrontation des éléments cliniques et para-cliniques.
– L’imagerie : l’échographie prostatique est simple, mais la moitié des anomalies détectées ne sont pas cancéreuses et la moitié des cancers restent inapparents à cet examen.
Elle permet ainsi simplement de guider les biopsies.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) multi-paramétrique est beaucoup plus performante que l’échographie en matière de détection précoce des cancers de la prostate. Elle permet alors de guider les biopsies vers des lésions repérées par l’IRM et permettrait ainsi de mieux détecter des cancers de la prostate significatifs.
La réalisation des biopsies
La biopsie consiste à prélever un échantillon d’organe pour en analyser la composition.
C’est le seul examen permettant de porter un diagnostic positif d’un cancer de la prostate. Il permet le recueil d’éléments pronostiques. On ne peut pas affirmer le diagnostic de cancer, et à fortiori instaurer un traitement quel qu’il soit sans avoir biopsié la prostate.
Préalablement à la réalisation des biopsies, le patient doit être informé par l’urologue des objectifs de l’examen, de ses possibles effets secondaires, de ses modalités détaillées ainsi que de celles de l’obtention de ses résultats.
La biopsie se pratique sous antibioprophylaxie et la plupart du temps en consultation, sous anesthésie locale, sans nécessiter que le patient soit à jeun.
Un lavement rectal est également souvent réalisé la veille de l’examen.
Le patient est installé en position gynécologique, ou couché sur le côté selon les habitudes de l’opérateur.
L’examen débute par un toucher rectal et se poursuit par une échographie endo-rectale.
Les biopsies sont faites grâce à un pistolet à biopsies et un guide d’aiguille solidaire de la sonde d’échographie.
On peut ainsi viser la zone à biopsier sur l’écran de l’échographe et déclencher la pénétration de l’aiguille avec un minimum de manipulations. L’aiguille traverse la muqueuse rectale et vient ainsi prélever à chaque passage du tissu prostatique. Une carotte de prostate est ainsi envoyée en analyse microscopique.
Les effets des piqures sont indolores, notamment du fait de leur rapidité grâce à l’utilisation du pistolet, mais le patient doit cependant rester allongé quelques minutes à la fin de l’opération.
Il y a plusieurs modalités de réalisation de ces biopsies de la prostate :
- Les biopsies de première intention sont systématisées en sextant, au moins 5 à 6 prélèvements par lobe (au total 10 à 12 carottes) étagées de l’apex à la base, et dirigées vers la zone périphérique de la glande, et éventuellement plus particulièrement vers toute zone échographiquement suspecte.
- Les biopsies à saturation sont beaucoup plus rarement prescrites, en cas de doute persistant dans les mois qui suivent une première série de biopsies. Elles comportent non pas 12 mais 32 prélèvements systématisés dans la glande et de ce fait sont plutôt réalisées sous neurolept-analgésie ou sous anesthésie générale au cours d’une hospitalisation ambulatoire de la journée.
- Les biopsies ciblées avec fusion d’image représentent l’évolution la plus récente de cet examen (anesthésie locale, pas d’hospitalisation). Les biopsies en termes de diagnostic du cancer de prostate sont plus rentables quand elles sont dirigées vers des zones suspectes de la glande par rapport aux biopsies systématisées réalisées « à l’aveugle ». L’IRM multi paramétrique permet de déceler de façon beaucoup plus sensible ces zones suspectes que l’échographie. Cependant il n’est pas possible de réaliser des biopsies IRM- guidées : elles sont obligatoirement écho-guidées. Une application logicielle permet de guider le clinicien dans la réalisation des biopsies de prostate. Elle permet l’affichage en 2 ou 3-D des cibles repérées par l’IRM sur l’écran de l’échographie de guidage. La forme tridimensionnelle de la prostate est obtenue par un contourage morphologique sur les images écho/IRM. Le logiciel ajuste ensuite les contours IRM aux contours échographiques pour apporter une précision optimale pour le ciblage des biopsies.
En cas de suspicion clinique, biologique, et/ou échographique, la biopsie de la prostate reste donc le seul examen apte à confirmer la présence de cellules tumorales et de définir leur étendue et leur agressivité, en fonction du nombre de prélèvements positifs et de la longueur de la zone suspecte. Les résultats en sont connus après quelques jours.
Effets indésirables possibles de l’intervention
Il faut expliquer au patient que les complications sont :
- soit rares et graves : c’est le cas de la prostatite aigue qui justifie que toute fièvre dans les suites d’une biopsie de prostate impose une consultation médicale voire une hospitalisation en urgence ;
- soit fréquentes et bénignes comme du sang dans les urines (hématurie) ou du sang dans le sperme (hémospermie) ou avec les selles (rectorragies) ou encore un inconfort périnéal transitoire.
Quelques éléments bibliographiques
Réalisation de la biopsie de prostate
Inefficacité relative du seul dosage du PSA*
Modalités de la biopsie
http://www.e-cancer.fr/cancerinfo/les-cancers/cancers-de-la-prostate/le-diagnostic/la-biopsie
http://www.urofrance.org/fileadmin/documents/data/PU/2011/v21i1/S1166708710002083/main.pdf
Le Dr André Philippe Davody est Chirurgien Urologue, inscrit depuis 1984 au tableau de l’Ordre des Médecins de la ville de Paris, spécialiste en chirurgie générale, en chirurgie urologique ainsi qu’en chirurgie robotique (Da Vinci). Il est également depuis 1999 expert près la Cour Administrative d’Appel de Paris.