Avec le concours du docteur Jonathan IFERGAN, ERQ
On dénombre en France près de 10 000 cas annuels de cancers du rein, décelés le plus souvent sans signe avant-coureur. Le diagnostic est aujourd’hui le plus souvent fortuit, porté sur un examen d’imagerie demandé pour l’exploration d’une autre pathologie (ex : vésicule biliaire et découverte d’une tumeur du rein droit) .
L’imagerie rénale est assurée par l’échographie et surtout par l’imagerie en coupes : uro-scanner et uro-IRM.
Malgré la grande fiabilité actuelle de l’imagerie rénale, seule l’analyse histologique de la lésion après intervention et / ou biopsies permet d’affirmer le diagnostic.
L’échographie rénale est utilisée en dépistage et permet souvent des diagnostics plus précoces de petites tumeurs encore asymptomatiques. En cas de suspicion de cancer ou d’anomalies détectées à l’échographie, la réalisation d’un uroscanner et / ou d’un uro-IRM sont indiqués.
L’échographie rénale
Elle utilise l’absorption des ultrasons par les différents tissus pour définir un contenu des organes analysés.
Cet examen n’est pas invasif et peut être répété sans conséquences pour l’organisme.
Il reste un examen de première intention et de surveillance, facilement accessible et de faible coût, mais sa sensibilité est limitée pour les petites lésions et il présente un taux significatif de faux négatifs.Il est également très opérateur dépendant .
L’uroscanner
C’est un examen radiologique basé sur l’analyse numérisée de la pénétration des rayons X dans les tissu. Il est ainsi obtenu une série de coupes transversales de la région à étudier – en l’occurrence pour l’appareil urinaire l’abdomen et le pelvis – et c’est le radiologue qui dirige son examen et décide de l’intervalle entre les coupes d’une série d’images ( 10 mm, 5 mm. etc…) .
L’ensemble de l’appareil urinaire peut être ainsi étudié : les reins (parenchyme et cavités), les uretères et la vessie.
L’uro-scanner comporte plusieurs séries de coupes successives.
1) La première série est effectuée sans injection de produit de contraste depuis le diaphragme jusqu’aux bords inférieurs des reins. L’interêt de ce temps dans l’exploration de la pathologie tumorale rénale est de déceler une composante graisseuse et des calcifications dans la tumeur.
2) Dans les 30 à 40 secondes suivant l’injection d’un produit de contraste à base d’iode qui est secrété principalement par le rein et excrété dans l’urine, il est réalisé une deuxième série de coupes depuis le diaphragme jusqu’à la symphyse pubienne.
C’est le temps artériel et néphrographique de l’examen.
3) Le troisième passage est effectué dans les 90 à 120 secondes suivant l’injection du produit de contraste, depuis le diaphragme jusqu’au bord inférieur de la symphyse pubienne C’est le temps tubulo-excrétoire. Cette série permet au mieux l’analyse du parenchyme rénal . C’est le temps essentiel pour la caractérisation des tumeurs, notamment parce qu’il va permettre de mettre en évidence un rehaussement de la densité de la tumeur après l’injection du produit de contraste par rapport à la 1ère phase sans injection.
4) La quatrième série, au temps tardif du retour veineux, 3 à 5 minutes après l’injection du produit de contraste permet l’étude des cavités rénales et des voies urinaires. C’est le temps excrétoire de l’examen qui permet de préciser les rapports de la tumeur par rapport à l’anatomie des voies excrétrices.
Pour favoriser le remplissage des voies urinaires, l’injection de diurétique est facultative.
De façon optionnelle, un temps très tardif, 15 minutes après l’injection du produit de contraste peut être réalisé en fonction de l’indication, notamment pour différencier un kyste dense d’une tumeur rénale.
Actuellement, on préconise de ne faire qu’un seul passage au temps tardif (si possible) pour l’exploration des tumeurs rénales, en association avec le temps tubulo-excrétoire pour ne faire que 3 passages afin de réduire la dose (principe ALARA pour « As Low As Reasonably Achievable », aussi bas que raisonnablement possible). L’association de ces différentes phases optimise la caractérisation des lésions rénales.
Cet examen est contre indiqué en cas d’allergie avérée à l’iode. En cas de doute, un traitement de désensibilisation préalable est prescrit,
Il est également contre indiqué en cas d’insuffisance rénale sévère et le radiologue demande toujours â voir un taux de créatininémie récent afin de s’en assurer.
L’irradiation que le scanner génère ne rend pas la réalisation de cet examen souhaitable en cas de grossesse.
Du fait de sa sensibilité et de sa précision et parce qu’il permet l’etude du contenu intra abdominal, l’Uro-scanner a totalement supplanté l’examen historique d’opacification des voies urinaires, l’urographie intraveineuse (UIV) dans l’exploration du cancer du rein.
Il présente une sensibilité supérieure à celle de l’échographie pour les petites lésions.
C’est l’examen de référence pour l’évaluation pre opératoire du cancer du rein.
Il n’est remplacé en première intention par l’uro-IRM qu’en cas de contre-indication â sa réalisation .
L’uro-IRM
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est une technique d’imagerie médicale permettant d’obtenir des vues 2D ou 3D de l’intérieur du corps de façon non invasive avec une résolution en contraste élevée.
L’IRM repose sur le principe de la résonance magnétique nucléaire (RMN) des noyaux atomiques des tissus, principalement l’hydrogène. Elle nécessite un champ magnétique puissant et stable produit par un aimant de 1,5 ou 3 Teslas qui crée une magnétisation des tissus. Il est alors réalisé des excitations dynamiques par des ondes radio pendant une très courte période: les atomes d’hydrogène sont mis en « résonance ». A l’arrêt de cette stimulation, les atomes restituent l’énergie accumulée en produisant un signal qui est enregistré et traité sous forme d’image par un système informatique.
Sur ce principe qui a valu à ses inventeurs, Paul Lauterbur et Peter Mansfield le Prix Nobel de physiologie ou médecine en 2003, il est possible de reconstruire une image en deux dimensions puis en trois dimensions de la composition chimique et donc de la nature des tissus explorés.
C’est donc un examen non invasif qui n’irradie pas le sujet.
Alors que le scanner ne permet d’obtenir des coupes que dans un plan transversal, l’IRM permet d’étudier le contenu viscéral avec une variété de plans de coupe et de séquences qui rendent cet examen délicat à interpréter par un non spécialiste.
Les séquences comprennent plusieurs modes d’acquisition différents, certains sans injections de produit de contraste, d’autres après l’injection en bolus rapide d’une « terre rare », le Gadolinum, qui permet l’opacification vasculaire et parenchymateuse.
Le Gadolinum a la même cinétique que l’iode utilisé dans l’uro scanner.
Certaines de ces séquences nécessitent que le patient examiné reste en apnée pendant la phase d’acquisition.
A l’exception des calcifications qui ne sont pas visibles, la sémiologie de l’IRM pour les tumeurs rénales est comparable à celle du scanner.
Des techniques avancées d’IRM comme l’étude en séquence de diffusion permettent de repérer les tissus cancéreux en y mesurant la diffusion de molécules d’eau.
En matière de tumeurs du rein, l’IRM peut apporter des informations au moins égales à celles du scanner, avec même une supériorité incontestable dans certains cas particuliers et principalement :
- les tumeurs kystiques
- l’extension veineuse et en particulier la détermination du niveau supérieur de l’extension du thrombus néoplasique
- la détection des petites tumeurs rénales (inférieures à 1 ou 1,5 cm) grâce à sa meilleure résolution en contraste que l’
- l’aide à la caractérisation tumorale(carcinome papillaire, à cellules claires ou chromophobe)
Par son caractère non invasif, l’IRM est utile en cas de grossesse ou d’intolérance aux produits iodés (insuffisance rénale, diabète, intolérance vraie).
Les limites sont les artefacts cinétiques (respiration, pulsatilité aortique, agitation) et les contre-indications classiques (pace makers, corps étrangers ferromagnétiques, claustrophobie).
Références bibliographiques:
http://www.em-consulte.com/en/article/249194
http://uroweb.org/wp-content/uploads/10-Renal-Cell-Carcinoma_LR.pdf
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22000497
http://eknygos.lsmuni.lt/springer/398/595-617.pdf

Le Dr André Philippe Davody est Chirurgien Urologue, inscrit depuis 1984 au tableau de l’Ordre des Médecins de la ville de Paris, spécialiste en chirurgie générale, en chirurgie urologique ainsi qu’en chirurgie robotique (Da Vinci). Il est également depuis 1999 expert près la Cour Administrative d’Appel de Paris.