Le traitement du cancer du rein quand il est localisé est exclusivement chirurgical, par la réalisation d’une néphrectomie, soit totale, soit partielle en fonction des caractéristiques de la tumeur. Classiquement, cette chirurgie est effectuée par voie ouverte. La coelioscopie permet de réaliser les mêmes exérèses par vidéo-chirurgie, à travers de minimes incisions permettant l’introduction des instruments chirurgicaux. Par rapport à la coelioscopie bi-dimentionelle classique, l’utilisation du robot chirurgical DA VINCI apporte au chirurgien urologue une vision tridimensionnelle et une grande dextérité dans le maniement des instruments, particulièrement utile pour la réalisation des difficiles néphrectomies partielles qui permettent d’épargner au maximum la fonction rénale.
Néphrectomies totales et partielles par coelioscopie
Comparaison des méthodes
La néphrectomie totale ou partielle correspond à une ablations totale ou partielle du rein cancéreux.
Classiquement, ces néphrectomies sont réalisées à travers de longues
- Incisions de l’abdomen:Incision sous costale ou bi-sous costale, ou incision verticale xipho-pubienne.
- Incisions de la fosse lombaire: lombotomie, qui donne un accès direct sur le rein mais qui est délabrante en raison de la nécessité de retirer partiellement la 11ème ou la 12 ème côte.
La cœlioscopie est une alternative chirurgicale mini-invasive pratiquée à travers de petites incisions de l’abdomen (4 à 6 incisions de de la taille chacune d’un trou de serrure : 5 à 10 mm), permettant l’introduction des trocarts dans lesquels sont placés les instruments chirurgicaux que le chirurgien manipule pour procéder aux gestes de dissection et de suture, et l’optique muni d’une caméra. Le champs opératoire est alors visualisé sur un moniteur vidéo.
L’étendue de l’exérèse rénale est la même, que l’intervention soit pratiquée classiquement à ciel ouvert ou par coelioscopie.
Cette méthode diminue le saignement per-opératoire, la douleur post opératoire, l’importance des cicatrices et le risque d’éventration post opératoire. La reprise du transit intestinal est plus précoce. La durée de convalescence des patients est plus courte et ils peuvent reprendre plus rapidement leurs activités personnelles et professionnelles.
Néphrectomie classique ou coelioscopique ?
Le choix entre néphrectomie classique, incisionelle, à ciel ouvert et coelioscopique reste fonction de la localisation de la tumeur, de sa taille et des habitudes du chirurgien.
Pour les tumeurs de plus de 7 cm. de plus grand axe, la coelioscopie ne se justifie pas car elle est plus complexe, plus difficile, plus longue à réaliser et in fine l’ablation du rein atteint impose une incision de même taille que celle d’une chirurgie classique pour extraire ce rein dans un sac protecteur.
La néphrectomie totale par coelioscopie est indiquée pour les tumeurs dont les dimensions sont comprises entre 4 et 7 cm. de plus grand axe.
La néphrectomie partielle par coelioscopie est recommandée pour les tumeurs de moins de 4 cm de diamètre. Cette technique est cependant très délicate en raison:
- de l’abord et du contrôle qu’elle impose des gros vaisseaux: artère(s) rénale(s) issue(s) de l’aorte et veine(s) s’abouchant dans la veine cave inférieure
- de l’indispensable qualité de la réparation du rein.
Une configuration anatomique de ces vaisseaux ou de la tumeur peut conduire à la contre indiquer et à réaliser une néphrectomie totale.
A tout moment il peut s’avérer nécessaire de renoncer à la voie coelioscopique et de convertir en une chirurgie ouverte.
L’utilisation du robot chirurgical Da Vinci est particulièrement intéressante en raison de ces difficultés.
Apport du robot chirurgical DA VINCI à la réalisation de la néphrectomie
La néphrectomie élargie et la néphrectomie partielle sont réalisables par coelioscopie assistée par le robot Da Vinci et l’utilisation de cet outil présente de nombreux avantages qui répondent aux exigences et à la difficulté de ces interventions. Le robot permet également dans certains cas sélectionnés l’ablation de tumeurs d’accès chirurgical difficile – notamment dans le hile vasculaire du rein- jusqu’alors quasi impossibles à réaliser en coelioscopie classique, même pour un chirurgien expérimenté.
Nécessité d’une intervention précise et rapide
La néphrectomie partielle consiste à retirer le cancer ainsi que toute la graisse péri rénale qui le recouvre.
Il faut également emporter avec la tumeur une collerette de parenchyme rénal sain pour éviter de laisser en place du cancer. Or le rein est un organe richement vascularisé et sa section est très hémorragique.
Pour la réalisation de cette chirurgie, le contrôle des gros vaisseaux du rein, l’artère et la veine, est essentiel.
Après un long temps de dissection du rein et de ses vaisseaux dans le hile du rein, le chirurgien réalise le temps proprement dit de l’exérèse.
Ce temps est réalisé sous clampage, c’est à dire sous interruption temporaire du flux sanguin de l’artère rénale voir de la branche de cette artère qui vascularise sélectivement la tumeur si le chirurgien a pu pousser la dissection de cette artère suffisamment loin.
Ce clampage assure une « ischémie chaude » du rein qui permet de limiter considérablement le caractère hémorragique de cette exérèse.
Cependant la durée de cette ischémie chaude doit être limitée, car si elle est trop prolongée elle induit une nécrose du rein et au final sa perte.
Le chirurgien dispose donc d’un temps limité pour enlever la tumeur et réparer le rein avant de pouvoir rétablir le flux sanguin rénal.
Le robot lui fournit simultanément toutes les informations, ainsi que les moyens de son action sur la région opératoire concernée, notamment par l’utilisation de 3 ou 4 de ses bras selon les habitudes de l’opérateur. La vision tridimensionnelle HD du robot magnifie le champs opératoire et permet d’opérer avec plus de précision ; la maniabilité d’instruments disposant de 7 degrés de liberté lui offrent un contrôle optimal des phases les plus délicates de son intervention, un filtrage de ses tremblements, une fixité du champs opératoire ainsi qu’un ralentissement local possible de ses gestes.
La maniabilité des porte aiguilles est particulièrement utile lors du temps de réparation du rein, facilitant la fermeture du rein et du système collecteur.
Préservation maximale du capital néphronique
La tumeur ainsi qu’une collerette de sécurité de parenchyme rénal sain doivent être retirées pour éviter une exérèse à « marge positive » qui n’est pas souhaitable selon les critères de la chirurgie carcinologique.
Le chirurgien active les instruments à partir de joystick dans lesquels il introduit les doigts de ses mains.
Il a un accès direct au champs opératoire à partir d’une console de visualisation avec des images en 3D et en haute définition, des possibilités de zoomer et de déplacer le champs opératoire afin d’améliorer sa mobilité et sa précision. Il dispose ainsi d’une meilleure visualisation du lit tumoral et il intervient comme s’il agissait directement sur les organes du patient.
L’utilisation de Da Vinci optimise ainsi la préservation du rein sain et l’épargne du capital néphronique du patient.
Reconstruction du rein
Après l’exérèse, il faut refermer le rein et le système collecteur s’il a été ouvert. La fermeture du rein doit assurer une hémostase précise pour limiter les risques d’hémorragie post opératoire. Elle doit également assure l’étanchéité du système collecteur sous peine de voir apparaitre en post opératoire une fistule urinaire.
Or ces sutures sont habituellement d’autant plus difficiles à réaliser que le temps dont le chirurgien dispose pour le faire est limité par les contraintes de l’ischémie chaude.
Le robot DA VINCI facilite grandement les gestes de suture. Cet outil permet une reconstruction du rein de meilleure qualité, réduisant le temps d’ischémie chaude de la procédure.
Recommandations
Les conclusions et recommandations de l’association Européenne d’Urologie 2014 (EAU guidelines) sont en fonction des stades TNM du cancer du rein
- La néphrectomie totale radicale laparoscopie a une morbidité inférieure à celle de la chirurgie ouverte classique
- Le devenir oncologique des tumeurs T1 et T2a traitées par voie laparoscopie ou ouverte est identique
- La néphrectomie partielle peut être réalisée soit par voieouverte, soit par voie coelioscopique classique ou robot-assistée en fonction des habitudes et de l’expertise du chirurgien
- La néphrectomie totale est indiquée chez les patients présentant des tumeurs T2 qui ne sont pas accessibles à une chirurgie partielle
- La néphrectomie totale ne doit pas être pratiquée chez les patients présentant une tumeur de stade T1 chez lesquels une chirurgie partielle peut être réalisée.
Il convient néanmoins de garder à l’esprit que l’expérience et la qualité du chirurgien urologue restent des éléments clés du succès de telles interventions. Il est également important de noter que les risques propres à chaque intervention et à chaque patient subsistent et que l’utilisation du robot ne saurait les annihiler.
L’arrivée du robot représente une nouvelle étape dans l’évolution du geste chirurgical, sans condamner néanmoins les voies traditionnelles qui donnent d’excellents résultats.
Le docteur DAVODY s’exprime en son nom personnel et ne bénéficie d’aucun sponsoring de la part de la société INTUITIVE SURGICAL.
Quelques éléments bibliographiques
Néphrectomies totales ou partielles, classiques ou coelioscopiques
http://www.artur-rein.org/chirurgie
http://uroweb.org/wp-content/uploads/10-Renal-Cell-Carcinoma_LR.pdf
http://www.cancer.ca/fr-ca/cancer-information/cancer-type/kidney/treatment/surgery/?region=qc
http://www.revmed.ch/rms/2008/RMS-182/Nephrectomie-par-laparoscopie-aspects-techniques
http://urologie.chru-lille.fr/cancerologie/111154.html
Néphrectomies par coelioscopie assistées par le robot Da Vinci
http://www.revmed.ch/rms/2011/RMS-320/Developpement-de-la-nephrectomie-partielle-robotisee-avantages
http://www.urologiebj.org/chirurgie_rein_prolapsus.html
http://www.urologie-cupl.com/technologies-innovantes/chirurgie-robotique/
Quelques vidéos sur les coelioscopies assistées par le robot Da Vinci
https://www.canal-u.tv/video/canal_u_medecine/nephrectomie_sous_coelioscopie.2760
https://www.youtube.com/watch?v=CeOn-TcJZ8A
http://www.chu-lyon.fr/web/4238
Aspects économiques relatifs aux néphrectomies robotisées
http://www.chu-lyon.fr/web/3740#11
Le Dr André Philippe Davody est Chirurgien Urologue, inscrit depuis 1984 au tableau de l’Ordre des Médecins de la ville de Paris, spécialiste en chirurgie générale, en chirurgie urologique ainsi qu’en chirurgie robotique (Da Vinci). Il est également depuis 1999 expert près la Cour Administrative d’Appel de Paris.