La maladie de Lapeyronie s’accompagne généralement d’un retentissement psychosexuel non négligeable qui peut varier d’un patient à l’autre, mais qui est quasi systématique. Les troubles sexuels, notamment les problèmes d’érection, peuvent être liés à cette souffrance psychologique et nécessiter une prise en charge pluridisciplinaire (médicale et psychologique) pour aider le patient. Cette approche multidisciplinaire est particulièrement indiquée en cas de terrain dépressif ou de troubles de type dysmorphophobie pour mieux répondre aux objectifs du couple, mais aussi pour mieux choisir les candidats à une chirurgie.
Les signes cliniques de la maladie de Lapeyronie
La maladie de Lapeyronie est une pathologie qui provoque des douleurs, un durcissement et une déformation du pénis. Ces symptômes, qui peuvent être très stressants, poussent souvent les patients à consulter un médecin.
Mais au-delà de ces problèmes physiques ou fonctionnels, la maladie a aussi un impact psychologique, parfois très important, qui n’est pas toujours exprimé. Ces troubles, qui surviennent chez les hommes d’un certain âge, peuvent perturber leur vie sexuelle qui est déjà parfois fragile et favoriser l’apparition de problèmes d’érection.
Ces problèmes d’érection peuvent avoir des origines psychologiques qu’il faut distinguer des origines physiques liées à la maladie, comme un mauvais fonctionnement des veines ou une perte d’élasticité du tissu qui entoure le pénis.
Comment évaluer le retentissement psychosexuel de la maladie de Lapeyronie ?
Pour savoir comment la maladie affecte la vie sexuelle du patient, on peut lui faire passer un interrogatoire. Il s’agit de lui poser des questions sur son parcours sexuel et ses attentes. Si la partenaire est présente, c’est encore mieux, car elle peut aussi exprimer son ressenti et ses besoins. Cet interrogatoire complet permet aussi de distinguer les couples qui vivent bien leur sexualité et qui ont moins de risques de souffrir de problèmes psychosexuels.
La plupart du temps, quand le couple communique bien, le patient et sa partenaire arrivent à s’adapter à la situation. Ils le font naturellement, quand ils sont bien informés sur la maladie et son évolution possible. Mais quand la maladie déforme trop le pénis et rend le rapport sexuel trop difficile, ils reviennent voir le médecin en consultation. Ils demandent alors souvent de bénéficier d’une intervention chirurgicale, ce qui peut être rapidement mis en place.
Mais la maladie de Lapeyronie est parfois moins bien tolérée au niveau psychologique, et les problèmes sexuels corrélés peuvent être classés en deux types, selon leur origine. Ils peuvent venir soit du fait que le rapport sexuel est devenu trop compliqué, soit du fait que le patient est trop inquiet à cause de sa maladie.
Les relations sexuelles peuvent être entravées par la douleur et la courbure du pénis. La douleur, parfois déjà présente dans les débuts de la pathologie, peut empêcher les patients de maintenir une érection ou provoquer un réflexe nociceptif qui oblige le retrait de manière trop précoce. Petit à petit, ces symptômes physiques altèrent la qualité de la vie sexuelle, jusqu’à induire un espacement des rapports et une perte d’intérêt.
Impact psycho-sexuel de la maladie de la Lapeyronie: les troubles psychosexuels possibles
On distingue 3 grandes catégories de troubles liés à cette pathologie :
Les dysérections psychogènes
La baisse du désir et la perte d’intérêt peuvent provoquer des dysérections dites psychogènes à cause de la perte d’habitude. Le plus souvent, un traitement temporaire peut suffire à corriger le problème. Dans certains cas, l’intervention chirurgicale peut améliorer la situation en agissant à la fois sur le plan physique et psychologique, en redressant la verge et en améliorant la capacité d’érections.
Le syndrome dépressif
Si les troubles de la sexualité poussent le couple à mettre leur vie sexuelle en pause, un syndrome dépressif peut s’installer progressivement jusqu’à être très présent. Le patient peut avoir l’impression de devoir faire un véritable deuil de sa vie sexuelle, avec des idées noires, une notion de perte de dignité et de masculinité. Outre le traitement chirurgical, une prise en charge ciblée peut être bénéfique pour accompagner le patient.
L’angoisse/les phobies
Le patient peut être particulièrement angoissé face à la maladie et aux malformations au niveau du pénis. Parfois, l’angoisse peut devenir une véritable phobie chez certains patients au vécu sensible. Les phobies les plus couramment associées sont la nosophobie, qui est en fait la crainte d’une pathologie indigne ou honteuse, et la dysmorphophobie, lorsque le patient vit la déformation de la verge comme un vrai handicap profond, peu importe l’importance réelle de la déformation. Ces phobies sont par ailleurs particulièrement présentes chez l’homme célibataire qui souhaite rencontrer de nouvelles partenaires.
Dans ce contexte, les hommes affectés peuvent être très demandeurs d’une prise en charge chirurgicale pour corriger la courbure de la verge. Mais l’indication d’opérer doit être discutée de manière très détaillée, et une consultation psychosexuelle est indispensable. En effet, les patients dysmorphophobiques peuvent avoir aussi du mal à appréhender leur nouvelle image après la chirurgie, et peuvent se sentir tout aussi impactés par le raccourcissement de la verge ou les dysesthésies. La vision déformée aura changé de sujet, mais sera toujours présente.
Il faut donc bien informer le patient des tenants et aboutissants de chaque possibilité thérapeutique et s’assurer de lui proposer un accompagnement psychologique personnalisé.
Le Dr André Philippe Davody est Chirurgien Urologue, inscrit depuis 1984 au tableau de l’Ordre des Médecins de la ville de Paris, spécialiste en chirurgie générale, en chirurgie urologique ainsi qu’en chirurgie robotique (Da Vinci). Il est également depuis 1999 expert près la Cour Administrative d’Appel de Paris.