Dans les cas d’une sténose de l’urètre bulbaire (SUB), ne dépassant pas 2 cm, l’approche thérapeutique actuelle est de recourir dans un 1er temps à une urétrotomie interne sous contrôle visuel direct, lorsqu’une simple dilatation n’est pas envisageable. Ces démarches thérapeutiques , malgré leur popularité, se soldent souvent par un taux alarmant d’échecs, avec des urétrotomies internes itératives amenant de nombreux hommes à suivre plusieurs épisodes de dilatations et d’urétrotomies internes qui aboutiront in fine à une urétroplastie tardive dont les résultats seront d’autant plus incertains que la SUB sera longue. Les auteurs d’une étude texane, forts de ce constat, ont voulu analyser l’évolution de patients dont les SUB ont été traitées par urétroplasties primaires.
Leur cohorte s’est limitée à 278 hommes sélectionnés entre 2007 et 2014, après exclusion des patients liées aux populations suivantes:
- Patients déjà opérés ou irradiés au niveau de l’urètre,
- Patients avec fractures du bassin ayant provoqué un décalage des fragments de l’urètre rompu, ou, à l’inverse, des candidats idéaux pour une urétrotomie interne
Une intervention retardée est synonyme de plus d’échecs
L’étude a classé les patients en 3 groupes: G1, G2 et G3 en fonction du délais écoulé entre le diagnostic de SUB et l’urétroplastie (respectivement G1: < 5, G2:entre 5 et 10, ou G3 > 10 ans).
Le diagnostic en question ayant été posé par urétrographie rétrograde, cystographie de vidange ou cystoscopie. C’est au cours de l’urétroplastie qu’a été mesurée précisément la longueur de la SUB en reportant son siège exact, que celui-ci soit médio-bulbaire ou bulbaire distal. Tous les traitements l’ayant précédé (dilatations, auto-dilatations, urétrotomie interne) ont été consignés.
La nécessité d’une ré-intervention a défini l’échec de l’urétroplastie, les opérés étant suivis d’abord tous les 3 mois puis en fonction de leurs éventuels problèmes urinaires.
Les conclusions de cette étude étaient les suivantes:
- Parmi les 1 287 reconstructions urétrales pratiquées dans la période, on a retenu 278 urétroplasties primaires, alors que le délai médian entre le diagnostic et le traitement par voie ouverte 9 ans, délai occupé en moyenne par un geste annuel.
- La cause de la SUB était le plus souvent inconnue (54 %) puis traumatique (24 %) et iatrogène (16 %).
- Au total 48 % des hommes se trouvaient en G1, 26% en G2 et 26 % en G3.
- Les malades du G3 avaient des SUB plus longues (2,5 cm en moyenne) et plus complexes à traiter, et avaient subi plus de manipulations urétrales dont des auto-sondages multiples. Les SUB > 2 cm ont nécessité davantage d’urétroplastie avec greffe. En analyse multivariée, les UI répétées ont été associées à des sténoses plus longues.
Au cours d’un suivi moyen de 5 ans, on a observé 34 échecs de l’urétroplastie (12 %). Plus que le délai, c’est la longueur > 2cm de la sténose et la pratique de > 2 urétrotomies internes qui sont des facteurs prédictifs d’échec.
Bibliographie
Viers BR et coll. : Delayed reconstruction of bulbar urethral strictures is associated with multiple interventions, longer strictures and more complex repairs. JUrol., 2018 ;199:515-521.

Le Dr André Philippe Davody est Chirurgien Urologue, inscrit depuis 1984 au tableau de l’Ordre des Médecins de la ville de Paris, spécialiste en chirurgie générale, en chirurgie urologique ainsi qu’en chirurgie robotique (Da Vinci). Il est également depuis 1999 expert près la Cour Administrative d’Appel de Paris.