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Un traitement novateur du cancer de la prostate peu évolué par photothérapie dynamique permet de réduire la nécessité de prostatectomie totale. Toutefois, il reste encore peu pratiqué en France et dans plusieurs pays européens.

Cette alternative est très intéressante pour le traitement des tumeurs prostatiques peu évoluées, toutefois, si elle est approuvée par l’Agence européenne du médicament, elle n’est pas encore remboursée par les organismes d’assurance maladie.

 

Comment fonctionne la photothérapie pour le cancer prostatique ?

Il s’agit d’un traitement réalisé en ambulatoire, sous anesthésie générale au bloc opératoire, et qui dure environ une heure. La tumeur est contourée par IRM puis par échographie prostatique. Le chirurgien urologue insère des aiguilles fines, creuses et munies chacune de fibre optique à travers le périnée afin de cibler la tumeur au sein de la prostate.

Ensuite, le bloc opératoire est éteint et le patient recouvert d’une couverture de survie et muni de lunettes protectrices. Le praticien procède alors à l’injection intraveineuse de Tookad Soluble, un produit photosensibilisant.

Il active ensuite les fibres laser qui émettent une longueur d’onde spécifique, proche de l’infrarouge, afin d’activer le produit dans les vaisseaux qui irriguent la tumeur. Des radicaux libres toxiques sont libérés de manière à dilater puis contracter les vaisseaux, et provoquer une occlusion de ceux-ci. Les cellules cancéreuses sont ainsi asphyxiées et vont se détruire.

 

Avantage de la photothérapie vs prostatectomie totale

Le traitement présente un bénéfice majeur : il permet de réduire les risques d’effets secondaires indésirables comme l’incontinence urinaire ou les troubles de l’érection. Le professeur Abdel-Rahmène Azzouzi, chirurgien-urologue au CHU d’Angers et expert mondial du traitement par photothérapie active, précise en effet que les troubles de l’érection touchent environ 80 % des patients porteurs d’un cancer de prostate traités par prostatectomie, contre 15 % avec la photothérapie.

L’idée est née à l’Institut Weizmann des sciences en Israël, en 1996 entre deux spécialistes : Le Pr Azzouzi a depuis réalisé dès 2008 la plus grande étude au monde au sujet de ce traitement, avec 500 à 600 patients traités pour une tumeur prostatique (dont la moitié des patients en France).

Un essai clinique européen a été lancé en 2011 sur 47 centres de soins. Au total, 413 patients touchés par un cancer de la prostate peu avancé ont été inclus. 206 ont été traités par photothérapie active, et 207 ont bénéficié d’une surveillance active, avec examens d’imagerie réguliers et dosage du PSA. Les résultats publiés en 2017 dans la revue The Lancet Oncology montrent qu’après 2 ans de suivi, seulement 28 % des hommes traités par photothérapie ont connu une évolution de leur maladie, contre 58 % dans le groupe de surveillance active.

La photothérapie est par ailleurs bien tolérée, ce qui permettrait aux patients de conserver leur prostate et de repousser voire empêcher l’ablation totale de la prostate pour les patients atteints d’un cancer localisé à faible risque.

Toutefois, il est nécessaire d’avoir plus de recul, précise le Pr Lebret, président de l’Association française d’Urologie (AFU). Les résultats publiés en juin dans le Journal of urology appuient les données précédemment récoltées de l’essai clinique de 2011 à 2017. Après 4 ans de suivi, les chercheurs avaient observé que seulement 24 % des patients traités par photothérapie active ont dû subir une prostatectomie totale, contre 53 % dans le groupe de surveillance active. Ceci est très encourageant, mais il n’existe qu’une seule étude randomisée à ce sujet. Des explorations supplémentaires sont nécessaires.

Chaque année en France, près de 50 000 nouveaux patients sont diagnostiqués avec un cancer de la prostate peu avancé. Le dilemme de la stratégie thérapeutique est toujours de proposer le traitement avec le meilleur ratio de bénéfice/risques pour les patients, entre la prostatectomie radicale, l’exérèse de la tumeur seule ou la surveillance active. Or, on estime à environ 20 000 le nombre de patients traités par ablation totale de la prostate. Pour le Pr Azzouzi, ce nombre est excessif pour la moitié des hommes. Si, en effet, l’ablation totale de la prostate reste le traitement de référence en cas de cancer avancé, elle peut se discuter dans le cas d’une tumeur localisée à faible risque.

Depuis la fin de l’étude en 2014, le traitement par photothérapie active est en attente, mais elle est actuellement en cours d’évaluation chez des patients touchés par une tumeur prostatique plus avancée, et dans d’autres types de cancer (cancers du sein triple négatif, cancer du pancréas, cancer de l’œsophage, cancer des voies urinaires).

Bibliographie :

Weizmann France – La prostate soignée par photothérapie