Aujourd’hui, de nouvelles options thérapeutiques laissent entrevoir des avancées dans la prise en charge du rétrécissement de l’urètre. La médecine régénératrice cellulaire et tissulaire est au cœur des recherches afin de réduire les chances de rétrécissement de la lumière urétrale après une urétrotomie interne et d’améliorer la construction de substituts urétraux. Le point sur les récentes études.
Qu’est-ce qu’un rétrécissement de l’urètre ?
Le rétrécissement urétral, ou sténose urétrale, est une diminution de la lumière de l’urètre faisant généralement suite à une spongiofibrose ischémique. Il trouve son origine dans plusieurs facteurs possibles, comme une infection ou un traumatisme. Ces causes induisent une lésion épithéliale qui, en guérissant, entraîne une réaction de fibrose. Cette dernière participe au rétrécissement du conduit et provoque des troubles dans le passage du flux urinaire. Le rétrécissement urétral peut entraîner des complications physiques et psychologiques néfastes pour le patient qui en est porteur.
Les traitements actuels de la sténose urétrale
La prise en charge du rétrécissement urétral dépend de sa localisation (antérieur, postérieur…) et de son lien avec la fonction du sphincter urétral distal. Lorsque la sténose urétrale est dite postérieure, elle est souvent consécutive à un traumatisme ou une intervention chirurgicale comme la résection transurétrale de prostate ou encore la prostatectomie radicale. Elle peut être traitée par dilatation. Lorsque la sténose touche des zones plus éloignées de l’urètre antérieur ou lorsque le rétrécissement est plus allongé, il est possible d’envisager une urétroplastie de substitution avec greffe de tissus (vessie, muqueuse colique, mais de préférence muqueuse buccale…). Le traitement initial consiste majoritairement à pratiquer une urétrotomie interne à vision directe (UIVD). Cependant, le taux de récidive de la maladie reste conséquent, limitant les chances de guérison durable.
Afin d’améliorer les résultats de l’urétrotomie interne à vision directe, les chercheurs se penchent aujourd’hui sur les thérapies régénératives. L’UIVD consiste à retirer le tronçon cicatriciel fibrotique pour permettre au tissu spongieux sain de se régénérer en cicatrisant dans un second temps. Récemment, un traitement par Optilume a été testé pour combiner une dilatation par ballonnet et l’injection de médicament (Paclitaxel), ce qui permet de réduire la propagation des cellules susceptibles de former la fibrose. Les premiers résultats sont encourageants, mais l’Optilume doit encore faire l’objet de plusieurs essais cliniques avant de pouvoir le proposer à un grand nombre de patients.
Les thérapies régénératives cellulaires
Le plasma riche en plaquettes
L’administration sous-muqueuse de plasma riche en plaquettes a également fait l’objet d’essais cliniques récents. Le plasma riche en plaquettes contient une forte concentration en protéines biologiquement actives capables de stimuler le processus de cicatrisation. Il est de plus en plus utilisé dans la prise en charge thérapeutique des blessures ou brûlures entraînant des problèmes de cicatrisation.
Les résultats seraient prometteurs, limitant les risques de récidive chez les hommes porteurs d’un rétrécissement primaire, court et bulbaire. Ces conclusions ont été appuyées par la réalisation d’une urétrographie postopératoire.
Les cellules souches mésenchymateuses (CSM)
Les CSM sont connues pour favoriser la régénération tissulaire. Elles sont étudiées pour traiter la sténose urétrale en raison de leur action anti-fibrotique, réduisant ainsi le rétrécissement de l’urètre. Par ailleurs, les CSM pourraient être envisagées comme traitement cellulaire complémentaire (adjuvant) à la suite d’une urétroplastie de substitution.
D’autres études scientifiques doivent être menées en ce sens, car les essais cliniques actuels n’ont pas encore concerné l’homme. De nombreuses inconnues persistent, comme le choix des CSM selon leur source (moelle osseuse ou graisse, greffe autologue ou allogénique…) ou encore la quantité optimale de cellules pour obtenir les résultats escomptés.
Les thérapies régénératives tissulaires
La greffe de tissus est un processus plus complexe que celle de cellules. Cependant, les bénéfices pourraient être améliorés, comme le démontrent plusieurs études récentes. On peut notamment citer l’utilisation de muqueuses buccales (obtenues par génie tissulaire) dans le traitement des rétrécissements de l’urètre par chirurgie.
Une étude clinique a analysé la possibilité d’injecter dans l’urètre après UIVD des cellules épithéliales provenant de la muqueuse buccale des patients, encapsulées dans un polymère thermo réactif. La combinaison cellule-polymère stimulerait le développement des cellules épithéliales en limitant les risques de fibrose et de récidive du rétrécissement urétral. Un autre essai s’est concentré sur l’association gel de fibrine et muqueuse buccale et a obtenu des bénéfices augmentés en termes de résorption de la sténose.
Les avancées scientifiques sont considérables pour le traitement du rétrécissement urétral. L’utilisation de cellules souches, de plasma ou de tissus dans le cadre des thérapies régénératrices fait l’objet d’essais cliniques poussés pour améliorer la qualité des greffons nécessaire à l’urétroplastie.
Bibliographie
Recent Advances in treatment of urethral stricture disease in men- https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7202089/
Le Dr André Philippe Davody est Chirurgien Urologue, inscrit depuis 1984 au tableau de l’Ordre des Médecins de la ville de Paris, spécialiste en chirurgie générale, en chirurgie urologique ainsi qu’en chirurgie robotique (Da Vinci). Il est également depuis 1999 expert près la Cour Administrative d’Appel de Paris.